Parmi les trois organismes susceptibles de remettre labels et certifications à des chronomètres, l’Observatoire de Besançon est le seul à contrôler des produits finis en toute indépendance. C’est aussi un acteur historique de l’industrie horlogère européenne, qui depuis la fin du XIXe siècle applique aux chronomètres le célèbre Poinçon vipère – une distinction que les passionnés de montres considèrent plus que jamais comme un gage d’extrême qualité.
Les deux vies du Poinçon vipère
L’histoire commence à la fin du XIXe siècle, très exactement en 1897. L’Observatoire de Besançon, depuis sa création en 1878 (sous la pression, il faut le souligner, des horlogers de la région) certifie les chronomètres à la demande des fabricants. À cette date, ses dirigeants décident d’apposer un poinçon de leur invention sur les modèles qui passent les tests de stabilité et de précision avec succès. Ainsi, le public pourra les reconnaître sans qu’il ne subsiste d’ambiguïté, car les bulletins de marche délivrés par l’institution ne suffisent plus.
Le Poinçon vipère est né : constitué d’une tête de vipère, il est appliqué sur la face visible du mouvement et précise la classe à laquelle le chronomètre appartient – de la 3e à la 1ère. Ce poinçon fait plus qu’homologuer la qualité technique et la précision d’un chronomètre : il valide un savoir-faire à proprement parler, le fruit d’une excellence qui côtoie la perfection.
Malheureusement, la première vie du Poinçon vipère prend fin avec la fameuse « crise du quartz » des années 70, qui mène à l’effondrement d’une partie conséquente de l’industrie horlogère européenne confrontée à la production automatique bas de gamme venue d’Asie. Les activités de contrôle de l’Observatoire se réduisent progressivement, avant de disparaître corps et biens.
Pendant une trentaine d’années, les instruments et les méthodes de l’Observatoire de Besançon prennent la poussière. Jusqu’à ce qu’une seconde vie commence, élevée sur les cendres de la première : à l’aube du XXIe siècle, l’Observatoire relance ses activités de contrôle chronométrique, encouragé en ce sens par les fabricants horlogers de toute l’Europe. Et il entend depuis jouer de nouveau un rôle de premier plan au sein de l’industrie des garde-temps, tout en rendant à Besançon son statut de capitale horlogère française.
La place du Poinçon vipère aujourd’hui
Avec le Contrôle officiel suisse des chronomètres (COSC) et le centre WEMPE Glashütte en Allemagne, l’Observatoire de Besançon est le seul organisme au monde habilité à décerner le titre officiel de « chronomètre », après moult tests et contrôles divers. Il est également, de fait, le seul organisme de ce type en France.
Mais ce n’est pas tout : après ses décennies de sommeil, la certification dite du Poinçon vipère est revenue plus forte – et plus précise – que jamais. L’Observatoire ne s’est pas contenté de reprendre ses activités ; il s’est doté d’une expertise scientifique reconnue mondialement, en poussant son unité de mesure quotidienne jusqu’au milliardième de seconde – la précision nécessaire pour les horloges atomiques. Mais heureusement pas pour les chronomètres, pour lesquels un écart d’une demi-seconde reste toléré.
La « tête de vipère » veille au grain
L’emblème du Poinçon vipère – représenté par la tête dudit reptile – permet de certifier « chronomètre » une montre mécanique emboîtée, à condition qu’elle réponde aux exigences de la norme ISO 3159 en matière de fiabilité et de précision. Les montres soumises aux tests de l’Observatoire de Besançon sont testées durant seize jours, période au cours de laquelle elles sont placées dans cinq positions successives et subissent trois températures différentes. Seuls les meilleures garde-temps sortent de ce baptême du feu avec succès.
La particularité du Poinçon vipère, en comparaison avec les autres poinçons existants (indépendants ou appartenant à des marques horlogères), est de certifier les montres terminées, telles qu’elles seront commercialisées, et non les mouvements seuls. Cette spécificité permet à l’Observatoire – et à sa tête de vipère – de veiller à un niveau de qualité absolu, sans risquer un éventuel dérèglement du mouvement au moment de son emboîtement. En ce sens, le Poinçon vipère est une certification véritablement définitive ; et le bulletin de marche, délivré à l’issue des tests, valide de ce fait une fiabilité totale.